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Le blog de la bi-licence Droit espagnol de Nanterre

Ciudad Juárez, capitale des filles disparues par Rebecca Dahan, Angie Gillet, José Antonio Fernández Torres, Clara Moreno Briz

8 Juin 2018 , Rédigé par Nathalie Jammet-Arias

Ciudad Juárez, capitale des filles disparues

 

 

Une vingtaine de femmes, mères de filles assassinées ou disparues, sont descendues manifester dans la rue le Jeudi 08 Mars 2018 à Ciudad Juarez, une ville du nord du Mexique frontalière des Etats-Unis, connue malheureusement pour les milliers de féminicides qui la rongent depuis des années.

 

   La manifestation s'est tenue à l'occasion de la journée internationale des droits des femmes célébrée ce jour-là.

 

Tout au long de la manifestation, ces femmes ont porté une croix, avant de se rendre sur le champ de coton, où les corps de huit jeunes femmes assassinées avaient été découverts quelques jours auparavant.

L’objectif des manifestantes était de dénoncer l’assassinat de plus de 30 femmes depuis le début de l'année en cours et cela uniquement dans l'Etat de Chihuahua, dont 15 dans la seule ville de Ciudad Juárez.

Dans la lutte contre la violence faite aux femmes, le Parlement européen, dans un Rapport du 20 septembre 2007, sur les meurtres de femmes en Amérique centrale et au Mexique, a qualifié ce crime et défini juridiquement le féminicide comme étant la violence faite à la femme pour le simple fait d’être une femme, précisé à l’article 1er de la Convention de Belém do Pará : "on entend par violence contre la femme tout acte ou comportement fondé sur la condition féminine qui cause la mort, des torts ou des souffrances physiques, sexuelles ou psychiques à la femme, aussi bien dans sa vie publique que dans sa vie privée ». Ciudad Juárez compte plus de 1 100 féminicides, en conséquence de ces chiffres au début des années 1990, la ville s’est vue attribuer le surnom de "capitale mondiale du crime", notamment envers les femmes, avec plus de 1 500 féminicides, d’après des expertises réalisées par diverses ONG.

La vague de meurtres de femmes au Mexique est en hausse depuis 2016 selon l’ONU, en effet en 2016, on comptait 2 746 féminicides, contre 2 324 en 2015.

De 1993 à 2013, 1 441 féminicides ont été commis à Ciudad Juárez, selon le centre universitaire Colegio de la Frontera Norte, qui reprend des chiffres officiels. Les deux-tiers de ces féminicides ont été perpétrés après 2008.

 

Dans cette agglomération frontalière des Etats-Unis, siège de la violence contre les femmes, les mères de centaines de victimes se battent chaque jour, pour que cesse l’épidémie de féminicides, contre la négligence et contre l’inaction des autorités en ce qui concerne le féminicide. En effet depuis la fin des années 90, Ciudad Juárez a retenu l’attention des médias internationaux et des organisations de défense des droits humains suite aux multiples séries de féminicides qui ont eu lieu. À de nombreuses reprises le corps de jeunes filles, mutilés, portant des traces d’agressions sexuelles, ont été découverts quasiment chaque jour dans le désert ; raison pour laquelle Ciudad Juárez avait été baptisée «la ville qui tue les femmes ». La négligence des policiers est illustrée par l’affaire qui suit, Susana Montes, mère dont la fille Guadalupe a disparue en 2009 à l’âge de 16 ans s’est vu remettre les restes de sa fille en 2011, peu à peu. En effet, la police lui a d’abord remis le mauvais corps, dont seule la tête appartenait à sa fille. Puis il y a quelques temps, les autorités ont frappé à sa porte pour lui remettre les côtes de sa fille.

 

 

En 2009, une sentence historique de la Cour interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) relevait la responsabilité des autorités mexicaines dans la perpétuation des féminicides à Ciudad Juárez, liée à la négligence caractérisée dans les enquêtes. La sentence ordonnait la création d’un Centre de justice pour les femmes, en effet plus de 600 femmes auraient disparu à Ciudad Juárez depuis 1993 selon les organisations civiles, qui luttent contre l’incompétence des autorités, car dans la plupart des cas, les corps des victimes sont localisés des mois et même des années plus tard, par fois les corps sont même découverts dans des fosses clandestines qui montrent une croissance exponentielle de l’horreur de cette violence. Ces fosses, suite à leur découverte ont été entourées de grandes croix en bois peintes en rose en honneur des victimes, sont de plus en plus nombreuses à Ciudad Juarez.

 

Bien que ce phénomène touche tout le territoire mexicain, la spécificité des féminicides commis à Ciudad Juárez est particulièrement alarmante. En effet, des féminicides sont commis en série par des réseaux criminels qui s’en prennent à des adolescentes pour les forcer à se prostituer avant de les tuer, ce phénomène a été particulièrement illustré durant le procès de l’affaire Arroyo Navajo qui a eu lieu en Juillet 2017, en l’espèce, cinq hommes, appartenant au cartel des Aztecas furent condamnés à 697 ans de prison chacun. Cependant, les associations proclament que la justice n’a pas atteint les hauts responsables du réseau, car Santiago González, avocat d’une des familles des victimes a expliqué que tant que le réseau n’était pas démantelé, les féminicides et les disparitions continueront d’avoir lieu. De plus, il a avancé que la corruption était un des principaux éléments qui fait que les féminicides perdurent de nos jours, cela car le procès a révélé que des forces de police et militaires avaient profité des services sexuels des jeunes séquestrées lors d’une patrouille en ville.

Les mères des victimes accusent le gouvernement et les autorités de se voiler la face et de ne pas accepter la réalité concernant l’exploitation et le niveau de violence envers les femmes et jeunes  filles et vont même jusqu’à discréditer l’importance du phénomène au point de nier son existence en effet, l’ancien maire de la ville avait qualifié les féminicides de «légende»; Gabriela Reyes, psychologue spécialisée dans l’assistance aux proches des victimes, dénonce la position des hommes politiques et déclare que : «La violence structurelle contre les femmes ne peut être combattue car il y a un système politique qui refuse de reconnaître et de rendre visible le problème».

En février, lors de la visite du pape à Ciudad Juarez, les mères des victimes ont peint des croix noires sur fond rose le long du parcours qu’allait réaliser le pape. Les autorités les ont effacées avec de la peinture grise. De ce fait, les immenses taches montraient au lieu de dissimuler, la volonté réelle qu’a le gouvernement d’occulter la réalité des féminicides.

 

Loin de diminuer, le phénomène des disparitions s’aggrave de jour en jour. En janvier et en février 2018, six adolescentes ont déjà disparu, depuis, le nombre d’enquêtes ouvertes n’est plus dévoilé mais le parquet spécialisé dans les crimes contre les femmes de l’Etat du Chihuahua admet que 130 dossiers de femmes disparues restent ouverts, en revanche-l’on sait que le taux de féminicides a augmenté de manière alarmante ces dernières années, attirant à nouveau l’attention du monde entier. Selon un rapport élaboré récemment par l’ONU et le ministère de l’Intérieur mexicain, sept femmes, victimes de la violence de genre, meurent en moyenne chaque jour sur le territoire mexicain, ce qui équivaut à près de 50 000 ces trente dernières années.

 

Depuis le début de l’année 2018, plusieurs affaires ont montré le déni dont font preuve les autorités concernant le thème de la violence envers les femmes qui règne au Mexique, ce qui marque le plus est que la plus part de ces jeunes femmes disparues ou qui suivissent la violences des hommes sont  généralement des femmes de la classe pauvre de la société dont les familles auront du mal à faire respecter leur droit qui est de mener correctement l’enquête à fin de retrouver des coupables et de les punir. Par exemple, une étudiante mineure a été violée par quatre adolescents, ceux-ci n’ont en aucun cas fait l’objet d’une quelconque poursuite dû au fait que leurs parents sont des personnes influentes.

Pour conclure, l’impact de cette manifestation s’est fait ressentir sur les réseaux sociaux en effet sur Twitter, un hashtag a été lancé le samedi 10 Mars 2018: #Miprimeracoso («mon premier harcèlement») et le lundi 12 Mars 2018, plus de 50 000 femmes l’avaient déjà, utilisé pour raconter la première fois qu’elles ont été harcelées dans la rue, il est alarmant de savoir que 40% des femmes mexicaines n’atteignent pas l’âge de 17 ans sans avoir jamais été victime d’harcèlement ou sans qu’on ait essayé de les agresser sexuellement. À cela il faut ajouter que 94% des femmes ne portent pas pleines contres leurs agresseurs du au fait qu’il n’existe pas un procureur spécialisé ou au moins des policiers capables de prendre leur plainte dans le respect et surtout de les croire et de leur porter une aide.

 

 

 

 

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